porta

Daniela Iaria, "Attraverso la porta bianca-fiume", 39x41 cm, 2004.
mercredi 1 décembre 2010
Italo Testa
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Mattinale
Matinale
1.
Fincantieri, 3 a.m.
trois heures du matin. les pelles mécaniques
découpent en champs bleus la nuit :
aux arrêts d'autobus le sternum
se soulève, s'abaisse, suit son rythme
sourd, éclairé par la lueur
du gaz qui s'enflamme sur les chantiers.
celles aux coins, à qui le passant
a vendu hier son innocence
regardent immobilisées les phares
entre les containers nus sur l'esplanade.
sans appétit pourra se nourrir
le chauffeur insomniaque au kiosque
où une aiguille descend sur la langue
si on n'attaque pas la vie à coups de dents :
et avec la lumière qui déferle sur les avenues
le dégoût essaime, et ton souffle peut
se rapprocher de celui des autres
qui aiguisent leurs talons contre les poteaux
semblables, toujours, sous cette apparence
aux buses à l'affût sur les vallées,
les voitures filent et agrippent,
déposent les os parmi les feuilles :
trois heures du matin, les pelles mécaniques
fendent encore la nuit, et immobile
le héron tapi sur les rochers
rêve de sa proie parmi les salicornes :
2.
Saipem, 6 a.m.
la lumière plus que tout, et les citernes
blanches, alignées le matin
comme un troupeau dispersé dans l'azur
et puis les grues qui tournent leur ombre
sur le mur et, lustrées, émergent de l'eau
pour combler les vides entre les nuages :
chaque chose salue quand, tout blancs,
étincellent les câbles haute tension
dans la poussière suspendue de l'aube
et à flots les coquelicots teignent
le blé encore vert et entourent
les piliers de béton en construction.
chaque chose s'est laissée voir
par le trou des toiles orangées
des clôtures aux bords des chantiers :
les gravats dorés, des flaques d'eau
de pluie derrière les bétonnières
inertes et revêtues de lumière.
chaque chose depuis la voiture qui passe
se montre incompréhensible et claire :
la carrière et les bancs de gravier,
ta tête ensommeillée, ma vie
conduite à travers la vitre parmi les choses
abandonnées sur les dunes herbeuses :
3.
Cryon, 7 a.m.
il n'y a rien d'autre
que le coquelicot et le genêt
qui brille dans les chantiers :
sous un câble un merle
regarde le ciel émaillé, immobile
sur la boue luisante
entre les pylônes
une bave de lumière dénoue
filaments et trames végétales
au-dessus de la Cryon
dans le blanc immaculé
un nuage de fumée
encore pour un instant
suspendu, déjà parti.
* * *
Bancs de gravier et lumière poussiéreuse
et un canal qui brouille le sommeil :
la dorure, le matin large
rampe le long de l'autobus qui roule.
le lent cortège des remorques
sur l'asphalte déjà chaud et brillant,
la germination insidieuse des ailantes
cachés sur les bas-côtés, parmi les franges
lustrées, dans un fouillis de feuillage
le vol résiduel d'un héron
et déjà entrevues, dans la fuite des branches,
les sèches calcinées par la lumière.
. . . . . . . . .. .. . . .. . . .. . . . . . . .De : La divisione della gioia (2010)
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . .©.les auteurs et CIRCE
jeudi 4 novembre 2010
Nadia Campana
I gelsomini dell'azzurro...
. . . . . . . . . . . . . . . . ."Misura della voce"
Les jasmins de l'azur
fleurissent par vengeance
défigurant l'ombre spectrale
qui avale en criant le jour,
ses qualités dans des formes
effrayées et pures sous le vrombissement de l'avion
sous le méridien,
qui-sait-où dans une ampoule
des multitudes d'élytres
se calculent :
la rose me pense qui est close
la paille me pense humide bien plus
étroite m'attend tranquille la tanière
qui creuse des coups autour
de la bouche du puits pressant les bords
dans le fossé qui sait ce que je retrouve
***
Nous, la longue plaine, imaginaires
nous engloutit comme des sacrements dans la nuit
Tu as été une quantité précise
dans la pluie qui saisit les visages
Mais à présent dans chaque coin de la pièce
nous attendrons en dehors de l'explosion
un bois que moi, ici,
j'ai construit (laisse-moi faire)
prodiges choisis par le hasard, peupleraies à parcourir !
Le tendre est au milieu et à l'intérieur
humilité d'une porte
en écoutant les trains, tout à côté, comme
une fièvre dans le souvenir précisément
Regarde le champ
Il est calme démesuré, ce matin.
***
L'obscurité comme un bien
Toutes les douceurs sont aux doigts
de rose l'habit se teint
le long de l'azur plein, comme je t'appelais
pour m'effacer, ici-bas, je te prie.
Pour toi, je te, je suis toi
qui me contient dans le tremblant recours
de ton silence viens à ma rencontre
horizon et élargis-le.
Comme des branches contre le ciel j'entrai en lui
une espèce élue de son coeur
comme des mondes rêvés par des myriades de rêves
déracinés au centre presque s'enfonçant
disons.
. .. . .De : Verso la mente, 1990, a cura di M. De Angelis & G. Turci
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . © les auteurs et CIRCE
.
mercredi 6 octobre 2010
Felice Piemontese
Felice Piemontese, est né en 1942 et vit à Naples. Il est journaliste à la Rai et critique littéraire au "Mattino". Il a notamment publié le roman Epidemia (ed. Pironti, 1989), Autodizionario degli scrittori italiani (1990) et un recueil de poésie intitulé La città di Ys. Plus récemment, il a publié Dottore in niente (Marsilio) et Fantasmi vesuviani (Hacca, 2009).
1)
bistrot di place de la Contrescarpe, carissimo
e inutilmente chic (questi erano un tempo
i luoghi della racaille, ma Parigi,
direbbe M. de la Palisse…), e bevendo
parecchi bicchieri di brouilly, fresco
come talvolta usano in Francia, finiamo
a parlare degli amici scomparsi, proprio
come fanno i vecchi. L., dico, aveva ancora
tanti progetti, basta pensare di essere
immortali, diceva, anche se sappiamo bene
che non è vero (e lui lo sapeva già
meglio di tutti). Un altro quartino
di rosso ci fa ricordare di quando
scrivemmo, insieme, un testo che intitolammo
“L’eternità commestibile”, e il titolo
ci piaceva moltissimo, il testo anche, e lo mandammo
in giro per il mondo (avevamo amici
dappertutto, tutti convinti che fosse il momento
di cambiarlo, il mondo). Un ultimo bicchiere
di vino servirà forse a tenere lontani
i folletti del terrore, per un po’, ma è lunga
la notte
j'ajoute que nous sommes assis (avec grand plaisir) à l'habituel
2)
diceva che l’osteria è il centro del mondo,
l’amico poeta Gerald Bisinger, perché l’osteria
è l’unico posto in cui
si può parlare di tutto, di donne e del
mangiare, di vino e di cronaca
nera, di politica, dei capricci del gatto, e perfino
di poesia. Per il festival (arrivò
con un bagaglio pesantissimo, perché si portava
dietro, scoprimmo poi, decine di bottiglie) riuscimmo
a trovargliene una, di osteria, sotto Castel
dell’Ovo, dove trascorse gran parte
del tempo da solo, bevendo pessimo vino
rosso, fin quasi a inebetirsi. Era più triste
di un lutto, come avrebbe detto qualcuno, ma riuscì
a leggere le sue poesie, in italiano, e senza
incespicare, con un piacevole
accento. Vado ogni giorno con la soprelevata
dal quartiere di Friedenau a Wannsee, a Berlino,
diceva, così mi vedo un bel pezzo
di mondo, ed è piuttosto piacevole,
in fondo. Da tempo ci siamo persi di vista,
e di un poeta è difficile sapere
anche solo se è vivo o è morto. Adesso
che il Muro non c’è più, e il pezzo di mondo
a sua disposizione è diventato
più grande, me lo immagino
in una bettola di Kreuzberg (così di moda,
però) o di Prenzlauer Berg mentre fa chiarezza,
come diceva lui, sulla morte e le malattie,
magari sperando ancora che la vita ci riservi
qualcosa di
il disait que le café est le centre du monde,
l’ami poète Gerald Bisinger, parce que le café
est l’unique endroit où
l’on peut parler de tout, de femmes et de
bouffe, de vin et de faits
divers, de politique, des caprices du chat, et même
de poésie. Pour le festival (il arriva
avec un bagage extrêmement lourd, car il emmenait
avec lui, nous le découvrîmes ensuite, des dizaines de bouteilles) nous avons,réussi
à en trouver un, de café, sous Castel
dell’Ovo, où il passa la plupart
du temps seul, buvant un méchant vin
rouge, presque jusqu’à s’abrutir. Il était plus triste
qu’un deuil, comme aurait dit quelqu'un, mais il réussit
à lire ses poésies, en italien, et sans
bafouiller, avec un agréable
accent. Je vais tous les jours par la route surélevée
du quartier de Friedenau à Wansee, à Berlin,
disait-il, comme ça je vois un beau morceau
de monde, et c’est plutôt agréable,
au fond. Depuis longtemps nous nous sommes perdus de vue,
et il est difficile de savoir, d’un poète,
ne serait-ce que s’il mort ou vivant. Maintenant
que le Mur n’est plus là, et que le morceau de monde
à sa disposition est devenu
plus grand, je l’imagine
dans une gargote de Kreuzberg (tellement à la mode,
pourtant) ou de Prenzlauer Berg tandis qu’il s’éclaircit les idées,
comme il disait, sur la mort et les maladies,
peut-être en espérant encore que la vie nous réserve
quelque chose de
3)
è facile sentirsi a casa, in qualsiasi città
della Spagna. Gli amici sono cordiali, e di notte
si può passeggiare a lungo nelle strade
deserte, perdendosi senza paura,
come un’anima in attesa del traghetto.
Un “altrove” che potrebbe funzionare, se pensassi
che esiste ancora un futuro. Invece
penso sempre più spesso – oltre che
alla mia – alla fine
del mondo, al momento in cui la vita
scomparirà dalla terra. In un film
ho visto il ferro che arrugginisce,
il cemento sgretolarsi, il legno e la carta
decomporsi, spegnersi
le luci artificiali, e tutti i circuiti
elettrici ed elettronici. Ovunque
tornano a crescere erba e piante,
anche a causa dell’azoto
prodotto dagli incendi
che più nessuno spegne.
Così, in pochi anni, di queste orgogliose
città restano solo rovine. Tra le molte
specie animali che si giovano della
catastrofe, ci sono le termiti, ma per fortuna
anche i gatti
like a soul waiting for the ferry (come un’anima in attesa del traghetto) è un verso di Ted Hughes
il est facile de se sentir chez soi, dans n’importe quelle ville
d’Espagne. Les amis sont cordiaux, et la nuit
on peut se promener longtemps dans les rues
désertes – se perdant sans peur,
comme une âme qui attend le ferry.
Un « ailleurs » qui pourrait fonctionner, si je croyais
qu’il existe encore un avenir. Au contraire,
je pense de plus en plus souvent – non seulement
à la mienne – mais à la fin
du monde, au moment où la vie
disparaîtra de la terre. Dans un film
j’ai vu le fer se rouiller,
le béton s’effriter, le bois et le papier
se décomposer, s’éteindre
les lumières artificielles, et tous les circuits
électriques et électroniques. Partout
les herbes et les plantes repoussent,
à cause, aussi, de l’azote
produit par les incendies
que personne n’éteint plus.
Comme ça, en quelques années, de ces villes
orgueilleuses ne restent que des ruines. Parmi les nombreuses
espèces animales qui profitent de la
catastrophe, il y a les termites, mais heureusement
les chats aussi
. . . . . .. . . . . . . . . . © les auteurs et CIRCE
. . . . . . . . . . . . . . . . . .
dimanche 29 août 2010
Franca Grisoni
Son premier volume, La böba (Genova, San Marco dei Giustiniani, 1986) reçoit le prix Bagutta, Opera prima. Parmi ses recueils, De chi (Milano, Scheiwiller, 1997) est lauréat du Prix Viareggio et L’Ala (Dogliani, Liboà, 2005) reçoit le prix Biagio Marin. Un choix de ses poèmes a paru en 2009 chez l’éditeur Morcelliana de Brescia.
...............................Ma chel saur...
Mais cette saveur de pêche
que je guette quand je croque,
où suis-je allée la chercher
si je ne la trouve pas dans le fruit.
Et ici j’ai bien des pêches,
et elles sont bien mûres
et elles ont une bonne odeur
mais je n’y trouve pas la saveur,
celle-là, juste de pèche,
et pourtant elle dégouline
et picote sur les joues
mais c’est qu’elle n’en a pas assez,
elle reste un peu en retrait
de celle que j’ai dans mes pensées.
................ ;;; ;;; ;;;.................De : La böba, 1986
................... ;;; ;;; ;.....;; ;;; .. trad. du brescian Lucrezia Chinellato
.......................... ;;; ;;; ..............;........;; ;;; ...© les auteurs et CIRCE
mardi 6 juillet 2010
Florinda Fusco
il risveglio…
***
le réveil , , , , , , , , et puis réunir les pieds
(il ne faut jamais réunir les pieds, les pieds ne portent pas la croix)
se lever ou ne pas bouger tourner la tête attendre que la pointe de lumière
tombe sur le front attendre avec les mains attendre que le ciment
arrête le pied , , , , que l'eau immobilise l'eau
je vois le jour , , , , c'est le jour à marcher sans pauses
le réveil , , , , , la respiration pour combler le jour , , , , soulever la tête
difficile de se lever car difficile de se lever
, , , le jour s'est ouvert , , , , , , le sol s'est ouvert , , , , , la terre est légère
la poule qui court ne doit pas se cacher
pouvoir courir sans personne , , , , , , la poule qui court ne doit pas se cacher
pouvoir courir avec son propre corps
, , , , , , , , avoir un corps
***
je ne sais pas où se jettera ce fleuve énorme de goudron
avec des boîtes de pinces à linge des dentifrices si ma tête contre
la tienne deviendra une noire souris qui couine ou des sandales
en bois qu'on achète au marché et quand tu utilises les voyelles
comme voyelles et les neurones suivent tes coups quand tu te cognes contre
mon thorax qui se dresse doucement comme un fer et quand la
coque est infermable et tu promets qu'arriveront les dromadaires et
tu racontes que dans les escaliers je trouverai le roi avec mes vêtements d'hiver
sur les bras
je ne sais pas à présent quel est le terrain je ne sais si la coque
sera dure ou marchera doucement comme le pied
les enflures aux genoux
quel est le trône ? quel trône était-ce ? et le don se donne ? ou tout existe
dans la digue dans le filet et dans la laine , , , , dans le matelas de la décharge
, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , dans la couverture avec du terreau l'insecte
cogne encore contre le doigt la note est dans les trois clés le duvet a poussé le ,
,, , , , , , , , , , ,, ,, , , , ,,, ,, , ,, , ,, , , , , , , , , , , , , , , , , sang bat dans le pied
je ne vais pas
,,,,, ,, , ,, ,, ,, ,,,, ,,, ,, ,, , ,,,, ,, ,, ,, , , ,...,,,, , , ,, , , , , , , , , © les auteurs et CIRCE
jeudi 3 juin 2010
Alberto Pellegatta
Alberto Pellegatta est né à Milan en 1978. Ses poésies ont été publiées dans de nombreuses revues ainsi que dans l'anthologie de Mario Santagostini I poeti di vent’anni (Stampa, Varese 2000), dans celle de Maurizio Cucchi Nuovissima poesia italiana (Garzanti) et dans Almanacco dello specchio (Mondadori 2008). Il a obtenu le Prix National de Poésie de la Ville de Meda en 2002 et le Prix Amici de Milan en 2002. Il traduit depuis l'espagnol et collabore à des revues. Parmi ses publications, citons Paratassi (Edb Edizioni Milano) et Mattinata larga (Lietocolle, Faloppio 2002).
,,,,,
Oxydation des étoiles sur les rails.
Tu es d'une espèce adaptée
tu montres le côté le plus fier du conflit
les ruines sordides, les impuretés délicieuses.
Origine des formules, typhon ou lubie,
toi, ange révoqué.
de : Paratassi (Edb Edizioni Milan 2007) et Nuovissima poesia italiana (Mondadori 2004)
*
Salon des Refusés
Les allusions onctueuses des saints
révèlent un zodiaque de chambres.
Le paysage fond dans le gris
et la ruine a aboli le soleil,
les collines ressemblent à un cerveau.
Touches, modules du sommeil. Prisons
et cordes.
de : Almanacco dello specchio Mondadori (2008)
*
Primo Premio Biennale Cetonaverde Poesia – Prima edizione :
S'abandonne, sans poids ni âme
à l'eau acrylique.
Fait le mort, tandis que le fond
ignore les carpes et les chats, se dégonfle
et ces rives inhalent
un paysage d'oxyde et d'étoiles
(de la piscine au bois, à la chambre à coucher, amour)
Ainsi il s'enfonce dans le corps naturel
et le vert circule en lui,
glissant et secret.
Les échelles débordent sur le pré musical
et le soleil ne sert plus à rien.
Le chant, inquiet, suit une grammaire
primitive, végétale.
Ce projet ne prévoit pas d'avenues,
de cadrans, ni de métros
mais des horizons allergiques et des lumières flexibles.
© les auteurs & CIRCE