porta

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Daniela Iaria, "Attraverso la porta bianca-fiume", 39x41 cm, 2004.
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mardi 19 avril 2016

Gianni D'Elia

Gianni D’Elia (Pesaro, 1953) est poète, romancier, traducteur, critique littéraire et parolier. Il a fondé et dirigé la revue Lengua (1982-1994) née de la collaboration avec des poètes et des intellectuels comme Roberto Roversi, Attilio Lolini, Katia Migliori et Stefano Arduini. Il a remporté le prix Carducci en 1993 et le prix Brancati en 2007. Il a publié de nombreux recueils de poèmes parmi lesquels Notte Privata (Einaudi, 1993), Congedo della vecchia Olivetti (Einaudi, 1996), Bassa stagione (Einaudi, 2003) et Fiori del mare (Einaudi 2015) d’où sont tirés les poèmes ici traduits. 



La Camène flaminienne

– Décennie après décennie, déjà plus de deux mille
ans que nous avons vu s’enfoncer,
de la Baie, qui en port se profile,
la ville, disparue dans un trou astral…

Là, où est le Phare, avec un jeune scribe
sur sa tablette courbé à rédiger
des vers en plein air,  au delà du marais
nous entendîmes le tonnerre et des hauts cris…

Du milieu de la côte, voilà la grosse mer
remplir le gouffre en une aspiration
engloutissant vivants, bêtes, maisons,
temples, cabanes, rues, fortes murailles…

La falaise tremblait en rugissant,
glissait dans l’eau en mille éboulements,
brisait le grès  et le tuf séché
en mottes violentes, croûtons de pain….

Lui il fut emporté, j’ai vu tout
le village se poser au fond de la mer,
sous le sol des siècles et du deuil,
ce que jamais vous ne pensez piétiner

quand vous venez vous promener à la mer
la rive flaminienne, Camène du flot…   



La route de la mer

Je pense fort au film raté de chacun,
quand le cinéma recommence vivant
et comme sur un set claque chaque clap,
ici, sous le Phare, qui flashe aux brisants.

Je suis la route de la mer, qui brillait,
quand l’an 2000 paraissait un objet
tellement éloigné, comme ton projet
de faire de moi un rivage qui rimait…

Lueur lointaine d’une planète froide,
et dieu sait quand on allait y atterrir
alors que déjà a disparu l’avion
qui nous propulsait d’un millénium à l’autre…

La raison précède, mais la douleur rend,
et ainsi on est arrivé brusquement
aux derniers confins de cette grande vague
qui nous a amenés au complet naufrage…

L’aube rêve de toi sur la douce berge
chère ville des jours réduits en miettes
entre débris et éclats qui ici abondent
en craquetant sous nos pas qui ne sont plus,

et répandent comme un pleur dans les ténèbres
la lampe rayonnante de Palinure…
Oh, aucune musique plus que la mer
ne peut calmer, bercer et faire rêver,

où l’ombre glisse déjà dans le soleil
en gravant des personnes contre la maille;
ici, sous les falaises et les fumées
il y avait un autre âge, à présent sombré,

au milieu du grand débris que crée le flux
au rythme saccadé, lointain et profond…



Fiori del mare (Einaudi, 2015)



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