porta

porta
Daniela Iaria, "Attraverso la porta bianca-fiume", 39x41 cm, 2004.

mardi 6 janvier 2009

Matteo Marchesini

Matteo Marchesini (né en Emilie Romagne en 1979), collabore depuis 1998 à l’annuaire critique de poésie sous la direction de G.Manacorda (Castelvecchi). Une brève anthologie de ses poésies a paru dans le volume Dieci poeti italiani (Pendragon, 2000). En 2004 il publie son premier recueil de poèmes Asilo (Edizioni degli Amici, Arezzo) et remporte le prix national Iceberg pour ses nouvelles Le donne spariscono in silenzio, paru en 2005 (Pendragon).

Asilo


Ancône, le port


Tu aimes les grues suspendues, dinosaures
en exil placide au-dessus du môle,
les câbles serrés sur les treuils, les gueules
sombres des bacs et le long solo

des scrapers dans lequel s'éteint le lamento
de leur museau jaune stupéfait : tu appelles
espérance d'enfance et transcendance
le lent, grave balancement au rythme des trafics,

et la danse de ces hauts jouets plus humains
que les hommes, tu voudrais la percer
jusqu'au mirage où l'Histoire cède

à son inconscient moqueur, et l'on entrevoit
dans le charme du mouvement pendulaire
un dieu enfoui, une lueur pour demain.



Ancône, allégorie


Peut-être un jour vivrons-nous au milieu des silos,
les grues seront pour nous toboggans et bois,
les proues, des terrasses ; en haut, les sombres cieux
du Conero, et plus bas, derrière l’école,

la mer et l’angoisse joyeuse des rails ;
nous pourrons alors déchiffrer l’énigme
de ces aciers aveugles, être les faussaires
d’une histoire plus fausse encore et de son dogme

qui pétrifie la voix de celui qui s’enfonce,
nous fabriquer un fragment incertain du possible
avec les scories du destin : et habiter

dans les branches de l’arbre sans trahir le monde…
(Ou peut-être l’espérance ne peut vivre
qu’inconnue d’elle-même, invisible, évadée…)


.. ............................de : La Città della polvere (ed. degli Amici)


***


Via Emilia Ponente


Les T.I.R. connaissent par cœur tous les champs,
le gravier des aires de stationnement, les pompistes
de la nationale neuf : au milieu des poulaillers,
au milieu des ruines, pour endormir les crampes
du sexe et du sommeil ils reposent placides,
les bâches rabattues. Ils se réveillent
au milieu des stands de galettes, penchés ils dessinent
des couronnes allumées comme de secrets
cirques ambulants, le nez pointé vers le Brenner.
Demain à Innsbruck pas de trattorias
sans enseigne, ni de décombres, ni de rues
Allende, Lénine, Gramsci, Guido Rossa,
ni les granges de ceux qui occupèrent autrefois
la route avec leurs charrettes, alla riscossa.



de : Marcia nuziale, Scheiwiller, 2009 (poème déjà publié, avec de légères variantes, dans Asilo, sous le titre I Tir, Edizioni degli amici, 2003.)
.................................................................................................... .............................................................................© les auteurs et CIRCE