On ne présente plus Amelia Rosselli (Paris, 1930 - Rome,
1996), certainement parmi les poètes contemporains italiens les plus connus et
aimés. Il importe toutefois de rappeler que CIRCE n’a pas cessé de s’intéresser
à sa figure d’écrivaine multilingue dont on connaît en France au moins Impromptu (éd. bilingue par Jean-Charles Vegliante revue par l'auteur, Paris, Tour de
Babel, 1987) ainsi que d’autres traductions de textes rares. Parmi les publications récentes, signalons l'édition trilingue d'Impromptu procurée par G.M. Annovi (Toronto, Guernica ed.) et le n° spécial de Nuovi Argomenti, printemps 2016, coordonné par Maria Borio.
Di sollievo…
De soulagement en soulagement, les bandes blanches les
papiers blancs
un soulagement, de passage en passage une bicyclette toute
neuve
avec l’eau de javel qui asperge le cimetière.
De soulagement en soulagement avec la veste blanche qui
dépasse brunâtre
sur l’abîme, croyance, tatouages et rangées de téléphones,
pendant que,
dans l’attente de M. le député, j’ouvrais ma veste. De
maison en maison
télégraphe, une bicyclette en plus, s’il vous plaît, si vous
pouviez en quelque 
sorte pousser. De soulagement en soulagement poussez ma
bicyclette
jaune, ma fumée transitive. De soulagement en soulagement
tous
les papiers épars au sol ou sur la table, lisses afin de
croire 
que le futur m’attend.
Que le futur m’attende ! que m’attende, que m’attende le
futur
biblique en sa grandeur, un sort tordu je ne l’ai pas trouvé
en faisant le tour des boucheries.
Forse morirò…
Peut-être je mourrai, peut-être je te laisserai ces 
petits papiers, en souvenir : ne distribue point  
de pensées dans les sylves, aux pauvres, mais aux
riches, offre en don tout mon sang. 
Et mon sang en riches flots refuse 
d’être surpris : promiscuité aux voisins
ou une selle en sylve. Serre autour                      
de moi ta main fleurie, repars pour 
un autre cas de fioriture exsangue, je 
n’ai jamais promis, permis, d’être 
celui qui languit. 
Mais sur le chemin de la vie il est une bataille 
De petits chiens, spectaculaire éventail à
mes condoléances. Attelle encore le char 
sur mes lèvres, qui en condescendant à
parler, étranglent, le sang, la vision
d’un inceste de sourires, promiscuités 
indirectes imperfections. Tant de causes à 
mon déguisement ambigu : un petit ventre 
qui respire, une voix qui se tait, et l’aspirine 
négligée qui rappelle : la mort est une douce 
compagnie, elle te retire, en dehors des aspirations. 
Morte j’engage le vers traumatologique
à contenir ces mots : écris-les sur ma  
tombe perdue : « elle n’écrit pas, elle meurt 
juchée sur le panier de choses indigestes 
incertaines ses manies ».
Incertaines ses prétentions, et la floraison en 
deuil, met en garde. Mitraillée par un fleuve 
de mots, elle argue, choisit une voie, non 
conforme à ses dextérités, s’il en était 
pour contribuer à la grande réforme des pensées 
si tenaces. Elle pose sa main droite sur le volant 
le brise et fluette s’envole pour les magnifiques 
fleuves. 
Serie ospedaliera (1963-1965)
© les auteurs et CIRCE
 
 
 
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