porta

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Daniela Iaria, "Attraverso la porta bianca-fiume", 39x41 cm, 2004.

mercredi 7 décembre 2011

Antonio Porta


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Antonio Porta (1935-1989), l’un des Novissimi et du Groupe 63, publie son premier recueil important en 1966 (I rapporti, Feltrinelli), suivi de Cara, 1969. Avec Passi passaggi et surtout Invasioni (1984, prix Viareggio), il réussit à donner une nouvelle impulsion à sa manière de faire de l’avant-garde sans renoncer à une essentielle veine lyrique. La question de la communication poétique – en particulier à travers une forme-journal visible dans les vers qui suivent –, a caractérisé ses dernières recherches, dont ce cahier jaune (Yellow), édité posthume par sa femme Rosemary et Niva Lorenzini. L’ensemble de sa production poétique est disponible chez Garzanti, Tutte le poesie, Milan, 2009.


Essences
.. ... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Per diventare albero…’’

2.
Pour devenir arbre
fait sortir ses boutons de la mousse
il faut un terrain plus souple et prudent
et sans poisons. Pour cela,
compagnon qui écoutes, garde
ces paroles signaux du où
et du comment, de la mort qui encroûte
nous libère la pluie qui ride.
C’est seulement le sens que j’affirme
il a forme d’arbre informe,
un pommier, un oranger plus sombre.
Je suis une fille à l’écorce brillante
aux feuilles qui flairent la semence
que je bois.
Je n’ai ni commencement ni fin
que je puisse voir ou palper,
tu peux me flairer, sentir,
évanouir.
. . . . . . . . . . . . . . .Fini d’écrire le 1.2.1985

3.
Le vent de la lumière
sur les feuilles finales de peuplier.
Lames d’or
dans la nuit la plus longue boutons
déjà prêts
du futur.
Autour
enfle un nuage immense
des flancs à la bouche je gémis,
le temps j’enlève
de mes yeux
suspendu dans la lumière du vent
attentif
à la voix qui se tait.
. . . . . . . . . . . . . . .Fini d’écrire le 1.2.1985

4.
La mer est toute égale, elle est toute calme
à l’instant du sommeil.
J’ouvre un œil, c’est le vent
et les énergies secouent le couvercle
et le golfe ouvre grand le soir
et le soleil ouvre grand le soir
et le soleil passe au-dessus des obstacles, et au-dessous
et la mare du golfe s’ouvre grand en océan
et l’océan se resserre en particule de cosmos
et la fuite s’arc-boute sur soi
comme un saut hors du puits.
J’ouvre l’autre œil et tout est son
et le golfe est rond comme une cymbale
et une langue le frappe
et les navires s’acheminent dans la tempête.
. . . . . . . . . . . . . . . . . .mars 1984. Fini d’écrire le 2.2.1985

5.
Barres blanches de la fenêtre
sur les paupières basses
unique lumière impriment
de noirs signaux, je me demande, tête penchée
presque en tendant le cou, « suis-je prêt ? »
Mais elle s’éloigne
et je reste en suspens, entre le maintenant
et l’ici, et le jamais, je m’emparadise
et dénoue, et remonte, de la gorge
elle se tresse à la soif, et s’élève
la voix, oui, la voix
dans un verre arrondi
elle tinte, et fait briller à fond.
. . . . . . . . . . . . .avril-mai 1984. Fini d’écrire le 2.2.1985


. . .  . . . . . de : Yellow, Milan, Mondadori, 2002 (éd. N. Lorenzini)

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . © les auteurs et CIRCE

mercredi 2 novembre 2011

Annalisa Comes

Née à Florence en 1967, Annalisa Comes vit entre France et Italie. Elle a suivi l'enseignement poétique d'Amelia Rosselli, ainsi qu'une formation en Lettres et français (traductrice, elle est également spécialiste de P. P. Pasolini et philologue). Elle collabore avec des musiciens et des metteurs en scène (C.D. Dal nuovo mondo, LE 2006, avec L. Negretti Lanner) ; pour ouvrage de dame (Florence, Gazebo) et Fuori dalla terraferma (id. 2011) elle a obtenu divers prix littéraires. Ce dernier recueil, dont sont tirées nos traductions, a été illustré par Fred Charap (Brooklyn, 1940). En 2008, elle a procuré une édition critique de Rinaldo d'Aquino dans Poeti della Scuola Siciliana, Milan, Mondadori 'Meridiani', 3 vol.



Hors terre ferme


L'explorateur des mers du sud

En été l'homme raconte d'autres étés.
L'un d'eux très long
et avec le bras il fait un geste ample,
mais sans nostalgie.
Il raconte une forêt tropicale
et l'océan qui chante
et l'eau qui se colore et lui il la suit
en prenant des notes sur son calepin jaune.

J'ai vu des photos de ses moulins.
Des bouts d'hélices et toute la classe qui sourit.
Il porte une jupe à fleurs de mauve.
Son visage apparaît et disparaît
devant et derrière l'objectif.
Il voyage nuit et jour
sans s'arrêter et pense
qu'ici c'est assez loin ; mais il ne s'arrête pas.

Puis un jour il est revenu à la maison
une maison au sud avec de grandes ombres
projetées sur les haies et sur la porte du garage.



Iles

La langue se réduit
et ils naviguent en tous lieux.
Quelle belle soirée, dit l'amie
à l'ami,
sur la terre qui n'est pas terre,
le sac plein de coquilles d'huîtres.

Voici l'homme que j'aime,
pour son front bleuté
et le blanc de ses tempes
et parce que
nous parcourons en long et en large les marées.

Il me donne la main
même s'il n'y a pas de terre
mais une étendue de rives,
aux méandres de fleuve tropical.
Mais nous sommes au nord.
Voici l'homme que j'aime
parce qu'il suit les étoiles
et lève le bras vers le pays.

Puis les terres s'abaissent.



Dès que

Dès que je descendrai de ce bateau,
- tu disais -
j'achèterai une belle maison à la campagne,
pour pouvoir compter tous les fils d'herbe
et les jours de voyage
et les jours où j'ai travaillé.
Il m'a fallu vivre dans une drôle d'époque,
avec ce temps toujours gris.

Dès que je mouillerai l'ancre,
- tu disais -
je laisserai ces bottes qui sentent le poisson,
et le ciré
et les cartes de ce désert bleu.

Dès que je toucherai terre,
- tu disais -
je me lancerai dans la culture d'un jardin tropical
et dans l'observation du vol des oiseaux,
je jetterai un coup d'oeil vers l'horizon.
Tout nouveau.

Moi j'écris et je cuisine
et par-dessus l'épaule
au delà de la rive je te réponds.

On s'habitue à tout.


Moules frites

Elle effleure sa joue
car il pleure, il s'essuie les yeux
avec sa serviette
et fait passer son cure-dents dans sa main gauche.

L'orage bat sur les vitres
féroce comme un fleuve en crue.
Dehors il y a de mauvais souvenirs.
Il passe la main sur son front,
sur la côte, sur le sommeil agité.

Un serveur du Sud
roule son accent italien
et écrit avec application le plat du jour :
je voudrais manger avec cet homme
tous les jours de ma vie.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .(trad. CIRCE, avec l'auteure)

Dessins de Fred Charap © 2011

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . .. . . . . © les auteurs, et CIRCE

dimanche 2 octobre 2011

Maria Grazia Calandrone

Romaine née à Milan (1964), poète et performer, animatrice radio, rédactrice du mensuel "Poesia", Maria Grazia Calandrone s'occupe aussi de critique littéraire (en particulier pour "il manifesto"). Interventions , lectures théâtrales et manifestations poétiques fréquentes. Elle a publié plusieurs recueils (La scimmia randagia, Milan, Crocetti, 2003, prix Pasolini Opera Prima), jusqu'à Sulla bocca di tutti (id. 2010) ou Atto di vita nascente (Faloppio, LietoColle 2010), et participe à des performances publiques. L'infinito mélo, pseudo-roman, a récemment inauguré une collection de l'éditeur Sossella avec CD de ses propres textes.



L'ultima stanza



La dernière pièce


Avec le temps la complexité de la maison

s’accroît – c’est un filtre alchimique, un décanteur

d’eaux industrielles mélangées

à des métaux solaires – qui dépose l’or du monde

par les fenêtres dans nos cheveux.

Assis, nous sommes inclus dans la recréation

étant donné une marge concrète de manœuvre dans les espaces communs.

Nous tombons goutte à goutte du bec des alambics

directement sur les objets

au niveau du sol, la voix lointaine. Nous apprenons à reconnaître

la mèche effilée, la plainte

de l’animal dans le distique prolongé des colporteurs.

Par l’ouïe nous jetons hors du corps (fermé

et très noir) de rayonnantes racines.

Maintenant les portes sont ouvertes : rêves

du dimanche. Le peuple

fait communiquer ciel et terre avec ses propres besoins.

Mais nous ne savons pas dans notre maison – étant donné

la délicatesse et l’abondance des organes, quelle est sa finesse.




Corps-diaphragme en majeure partie


De la végétation affleure le corps

des pommiers – avec leurs médaillons d’or. Bannières de calme plat

dans le blanc de la machine adriatique – déboussolée

par la tempête immobile des estacades, sanctuaires tangants

de bois et de rebuts

ferroviaires sur plusieurs mètres de mer. Les hommes de la montagne

dominent l'Inquiet de leurs plateformes – ils prolongent dans le deuil

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . des eaux

la terre, sa verdeur de meule sylvestre – et le soleil

règne plus grand que la peur.

Les manches retroussées, les pieds nus

- de la côte ils prononcent les Nombres donnés

par les étrangers

qui cultivent l’ange des rêves – cœurs pleins de larves

et de pissenlits – arrachés à la beauté boréale. Ah, si nous étions !

forêts de mâts dans la brume – voici le Souverain Ensemble

sur les taches du Neutre de tous les jours – le pollen dispersé

par le vase des siècles, où la somme des tempêtes est égale

au froncement inconstant d’un sourcil.

Mettez donc ma santé à côté de celle de notre frère

avec des projections de neige polluante sur les pins

qui ont des ombrelles de méduses terrestres pour que rien ne manque,

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . pas même

des roses hématiques et des rouleaux de parchemin dans les mains ou

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . .. .. . . discours

sur le climat et le sol et sur les passerelles rongées, qui changent

la mer en terre – frêles – comme toi mon amour, qui sillonnes le large

de tes sabots de pierre et manifestes une originelle collision.



. . . . . . . .. . . .de : L'illuminista - Poeti anno zero, n. sp. (fév. 2011)

............. . . . . . . . ....... . . . . . . . . . . . . . . .© les auteurs, et CIRCE

mercredi 7 septembre 2011

Raoul Precht

Raoul Precht, né à Rome en 1960, vit et travaille à Luxembourg (LU). Traducteur de l'espagnol et de l'allemand (Auerbach), il a publié en 2004 le recueil Vaga favilla et des études sur la langue littéraire ; il est présent dans l'anthologie "Scrittori italiani in Lussemburgo" (2010), et collabore à diverses revues. En 2008 a paru son premier roman Senza tracce, muto come affonda una nave (Foschi).


Lo specchio dell'albergo...


Le miroir de l’hôtel se réduit

à un caléidoscope d’étranges reflets

recomposés fragment après fragment

par le visage défait d’un passant qui a beaucoup

marché. Je m’approche et vérifie

que dans les invisibles fissures du verre

rien n’ait disparu, pas même une des rides

conquises sur le terrain d’un déplacement

à l’autre, par la confusion des temps.


Mais la surface lisse et uniforme

de la partie que je libère de sa buée

ne confirme pas les craintes, fruit de la fatigue.

Tout est là, jusqu’à la moindre trace

de la boue et des ronces que j’écrase

toujours. À ceci près : ici,

les buées l’emportent,

brumes virant au sépia,

dimension aquatique.



Ville de fontaines byzantines et de citernes,

d’une humidité qui ronge

et régénère, ville dessinée

de rigoles et de flots piquants

dans la foule des rues

du bazar, c’est ici que je m’arrête,

Orphée aveugle, pour te perdre un instant à peine,

ô ma stabilité, derrière les reflets

colorés de la Yerebatan Sarnici.


. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .© les auteurs et CIRCE

mardi 16 août 2011

Michele Sovente

Michele Sovente (Monte di Procida 1948-2011), poète des Champs Phlégréens en italien, en latin, en dialecte de Cappella - très proche du napolitain -, parfois en français, a obtenu le prix Viareggio pour Cumae dont sont tirés ces deux textes (1998). Dernier recueil paru, Superstiti (Survivants), S. Marco dei Giustiniani, 2010. Il dénonçait "l'autophagie sans bornes" de sa région bien-aimée, où il avait su trouver un lectorat attentif, tout en explorant avec passion et en faisant vivre cette culture hybride, multiple et changeante, chaque jour au bord de sa propre catastrophe. Il a été peu traduit en français.




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Arbre et oiseaux

Mihi sunt… / C’est à moi

Ces bras c’est à moi des yeux
je touche et vois de pâles
ailes dans les eaux, des queues
peu à peu dans mon sommeil
d’obscures fenêtres
je les sens miennes nuées
nouées, des branches c’est
à moi des vertèbres, et donc
m’émeuvent des fragments
de lumière engloutie, de suintantes
pustules m’effleurent
et des ongles me desquament,
mille fois en feu c’est
à moi ces feuilles frontalières.


Aves / Oiseaux

Entre eux les oiseaux
se partagent les airs, portant
lumières et désirs sur leurs ailes
de l’hiver à l’avril.
Leurs souffrances, leurs routes
par les vents mauvais,
en grincements plus longs
que de bourbeuses portes, aux oiseaux
des oiseaux vers la nuit doucement
par le menu racontent.


; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; ; .. de : Cumae, Venise, Marsilio, 1998
.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . .. trad. du latin : J.Ch. Vegliante
.. . . . . . . . . . . . . .. . . . .. ... . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . .. . © les auteurs et CIRCE

lundi 11 juillet 2011

Andrea Zanzotto

[... suite...]



II

Mais où l'errance de notre réveil dans tes
serpentines et innocentes trames
où rassasies-tu du bien mental
la faim, en quels espaces, en quels vides d'un autre pouvoir.
Il n'est songe ni stase ni ardeur
. . . . . . . . . . . . . . .. . . . .. Ellébore
qui approprie à chaque créature
chaque distance de soi, et qui l'appelle
ou en ne te laissant pas trouver la redonne à soi
ici et là par l'immense des chambres
soudaine feuillaison jusqu'au noir des pétales noirs
devant eux je vois, je deviens clairvoyant
devant la fenêtre qui donne sur les monts et sur
la sempiternelle guérison. Et les trames
de la guérison soupirées et la sempiternelle guérison et les maternels
habits, et les habits et les livrées de la guérison crépitant
de lumières extérieures, tout à coup tu me les caches, ou à voix
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . .. . . . . .. . . basse
proposes et vantes
comme voudraient les mots, mais ici
ils glissent en paralysie, en intérieurs de poésie - [ainsi] et [ainsi.]
Tombent au contraire en silence de cireuses circonstances
.. Ellébore
de pétales - du blanc au noir -
pour dir-divertir (si les dryades le permettent et les bibelots de
bois-intérieurs) de ce que fut chaque amour-folie
chaque acronyme
chaque rébus d'esprit-folie

Et entre-temps, dans le tremblement des intérieurs
tu deviens fleur de lune et givre et d'aube fine entre les mains
recueillie - aube de pensée rare et étrangère,
qui osa changer chaque sommet ou racine
en sombre humilité. Retiens-nous, toi, offert à tant
de coins ravis, de la maison, du crépuscule-maison . . .. . . . .Ellébore
retiens-nous avec toi et avec le monde non par des forces
presque d'hypnose, mais de roses phases
parmi de noires racines et pétales du vert ; toi force
en trajectoires allégées, donne
hypnose plutôt à chaque schizome, thériaque*
sois de millièmes de variétés d'êtres
sapide, dignité qui apaise,
guéris-nous ou précoce ou ancien ou en fuite ou immobile
halo qui disperse et trompe
toi ramené du fond des marais d'intérieurs
du plus ancien lait, latex, qui brille,
et aveugle par ta noirceur
tiges et pétales et racines de Sibylle.

* Électuaire vénitien, la thériaque se composait de nombreux ingrédients et on la trouvait en pharmacie il y a encore quarante ans. Souvenir de la panacée.

. . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. .. . . (Ed. Mondadori)

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . .. . . . . . . . . . © les auteurs et CIRCE


samedi 4 juin 2011

Andrea Zanzotto

On ne présente plus Andrea Zanzotto, sans doute le plus connu (et aimé, y compris en France) des poètes italiens contemporains. Il nous importe peut-être de rappeler la présence têtue chez lui d'une tension plurilingue, voire d'une utopie de communication entre les langues - à tout le moins, entre langues romanes. Né à Pieve di Soligo, où il vit, en 1921, il s'est imposé d'emblée avec un recueil dont nous aurions pu, ici, emprunter le titre : Derrière le paysage (Mondadori, 1951). En 1999, il a rassemblé l'essentiel de son oeuvre dans le "meridiano" du même éditeur, Le poesie e prose scelte. Successivement ont paru d'autres importants recueils, dont les Scritti sulla letteratura qui l'imposent aussi comme une voix critique majeure de ce début de XXI° siècle, ainsi que Conglomerati dont est tiré le diptyque Ellébore ; nous sommes fiers d'en proposer aujourd'hui - pour commencer - la première partie.



Ellébore: ou quoi donc ?


I

En chaque chambre, en chaque secret
interstice je te rencontre, vous rencontre, ellébore
bouquets au pied caché, souterrain
en soignante folie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..... . . .Ellébore
multiples et doux comme vos caresses
de feuilles qui ramènent
de la chambre de la maison
à celle de la petite vallée
plus simplement perdue et mouillée en elle-même ........Ellébore nom
et dans son propre hivernal interstice . ... .. de tant d'espèces de plantes
son propre enraciné indice . . . . . . . . . . . . . .. .. liées en énigmatiques
de beauté ou obscurité toujours en délire. . ..... . .similarités de racines
Si légèrement se donner, caressé . . . . . . . . .. . .. ..rhizomes de poisons
. . . ..en soi, étendu en enthousiasme apaisé . .. .. .convergeant parfois
Oh, calme, Calme, ellébore . .... ... . . dans les rosalités les plus profondes
sont tes duplicités et tes corolles-caresses .. ...... ..(: des dictionnaires)
humbles comme les guéries folies
en ces suites de chambres
subrepticement épanouies et puis récupérées . . ... ....... ..Ellébore
. . . .. .en rampant
Ellébore n'est plus ton nom
en quelques vagues erreurs des saisons
tu es carneval qui est distance et dégringolade
dans le monde renversé où tu t’insinues
par des coteaux domestiques le long d’apaisés et modestes noms
de caméléon à peine visible, mais
présente petite plante petite sœur pour nous peut-être morte
en voulant guérir nos folies –
dans les interstices, dans les chambres harpies
de la maison et non maison, du poème aux plus
menaçantes règles et dissymétries.
Oh adieu à ta carnavalesque .. . . . . . . . . .. . . . .... ..... ..Ellébore
et rose bécotée
soudaine résurgence et puis rapide disparition.
Emporte avec toi ce qu'il y a de plus secret
et surdigne et brûlant de fièvres
dans la lampe torve d’acariens des tapis d'intérieur,
médication que tu rends médication
ton glissement même quand tu te relies à l’idée
de folie, de sorte qu’en la fuyant tu nous gouvernes
. . . . . ..disparaissant-disparaître
. . . . . ..intersticer-fou de feuillets roses
.. . . . . .potion-consommations de feuilles peut-être noire mégère.



..................... . ........de: Conglomerati, Milan, Mondadori, 2009


. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..© les auteurs et CIRCE

mardi 3 mai 2011

Gualberto Alvino

(Rome, 1953) Depuis sa thèse de doctorat sur Antonio Pizzuto, il n’a cessé de s’intéresser aux « irregolari » de la littérature italienne, comme Stefano D’Arrigo, Vincenzo Consolo, Sandro Sinigaglia ou Nanni Balestrini. Il a collaboré à de nombreuses revues scientifiques, mais il publie aussi, à partir des années 80, des nouvelles, des traductions (Blake, Eliot, Thomas) et des poésies. En 2008, sort son premier roman, Là comincia il Messico et en 2010 un recueil de poésie Da caccia, da séguita e da ferma (Mirkal Ebook).


Pepe

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . Pour Aurora, toute proche

déjà au premier tiers de son cours
à bien y regarder
pendant qu’il dormait avec son grand-père sur leur lit de feuilles
dans la moiteur crissantes à chaque mouvement

il paraissait parler dans son sommeil
vomissement rots accès de fol’amor alors qu’il comptait

les poires cueillies par les filles d’un quatrième lit, les changeait . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. en talents
ne savait même pas son nom
quatre femmes et pas une reine

pedicabo et inrumabo
la dernière morte en tombant à cause d’un philologue ivre

dans une taverne défoncée
un demi quintal sur la tête, un fœtus à quelques jours
elle devait être ma mère, son cheval Baron
accourait au premier sifflet

son fils semblait plus vieux que lui, il l’appelait papounet
en touchant son torse de son menton à son passage saluait
bien bas de modeste manière
tel un rhabdomant avec son ancestrale baguette de merisier
tu peux marcher sans ?
cette façon fin de siècle presque rustre

un pain farci deux bières brûlantes
d’office sur la table vendredi jour de marché il y avait presque . . . ... . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . .. . . . . . .. . . .toujours

le soleil les filles les montres étincelantes des frères
tous ses petits-enfants conduisaient les camions

selon 4 ça sent le sous-bois les champignons trop vieux
9 dit qu’au milieu de l’aire il y a une trappe
couverte d’un bout de tonneau aplati sous lequel
s’ouvre grand tout un monde preuve en est que

la puanteur les murs lépreux
la tante belge ne revenait que pour se baigner dans la rivière

et en ramener l’odeur aux copains de la mine plongeait
trois fois d’un tronc puis battait ses chemises
sur les pierres les pétrissait en remuant
les hanches pour son symbiote de mari posté
sur la centrale ses moustaches acérées Charleroi
vibraient à chaque bouffée

saxophone sur le petit doigt bandes d’enfants
apprends-nous la musique

des poissons sortaient leurs petites têtes des trous au rythme de
il fumait sans filtre en toussant non sans pudeur puis
repartait avec des rires la tache d’humidité au plafond
ce fut le premier tableau qu’il vit

tel est le destin de tout précurseur
exactement

j’y retrouve tous les éléments
du premier au dernier

difficile à croire mais une étymologie ne se cherche pas elle se trouve
du cercle au centre
du centre au cercle
lui conférant sa tonalité particulière
embardées hors des analyses de style
libre complètement exempt de
perturbatrices interférences
avec une fougue de cruciverbiste

en démêlant le fil de l’écheveau embrouillé
tout un enchevêtrement d’images chacune avec son

arôme celles des songes ne sont plus allumées
s’organisent par groupes souvent en conflit

et dire qu’ils ne peuvent pas se passer
l’un de l’autre, du reste on le sait
les faibles vont vers les faibles
de forts il n’y en a pas et pourtant les cuirasses

sembleraient du meilleur alliage
mais il ne faut pas croire que l’herméneutique

soit déformation c’est un contresens
étant donné que l’œuvre n’est pas forme mais tension

on dit l’interprétation est d’autant plus authentique qu’elle
évite de se livrer à la distorsion
demande pourquoi l’œuvre devrait devenir part
de notre présent

je ne sais mais il est clair dès cet instant
que l’amour infini pour la langue

je le revendique, le droit d’affirmer
en pleine science et conscience
est la première étape d’un parcours
florebat olim
rayonnant
en mille directions

qu’adviendra-t-il du cerisier ?

[Inédit en volume]

........................... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . .. . . . .© les auteurs et CIRCE _________________________


Pepe-transduction

[en/- tradu/cen/isant/do]
Per/our Aurora, toute pro/chessima
pro
à t de s c
bn der
= RESTES .. . . . . . . . .dorm su d ((spathes))
crant
sem parl so
r t fol’amor a
le pre e le fi d’ qua lt, le a n talent

______________


déj/già nel primo au premier terzo/iers de/l suo/on cors/ours/o

a/ à be/ien y ve/regarder/e

mentre pendant qu’il dorm/ait/iva col avec son nonno grand-père su/r/l / un giaciglio lit di/e sponze feuilles

dans la
nell’umidore moiteur cr/iss/occhiant/esi a/à ogni chaque girata mouvement

il
sembr/l/ava/ait parlasse/er nel dans son so/mmeilnno

vomissemen
t/o ru/ots/ti accès/essi de/i fol’amor alors qu’i/invece/l cont/compta/

le/s pe/oire/s rac/cueilli/olte/s da/ par/le/s fi/lle/glie/s di/un qua/trième/to le/it/to le/s tramut/change/ava/it i/en talent/s/i



(transcr. J.Ch. Vegliante)